mercredi, mars 14, 2007

Une idéologie de l'incompétence

Après l'idée de ministère des moeurs et des pratiques culturelles (note: un peu d'humour ironique heureusement imaginaire -> pourquoi pas un ministère de l'immigration et de l'identité nationale...) légiférant sur les comportements en communauté, c'est à dire dans un espace ayant pied à la fois dans la sphère publique et la sphère privée, Alexandre Obrodje propose la taylorisation de l'enseignement public:
  • Les établissements recrutent les élèves
  • Les professeurs sont jugés sur des objectifs quantitatifs
  • Lorsque la productivité ne suffit pas au soutient de l'activité les moyens sont baissés
On peut tout d'abord noter du manque de culture du candidat. Ces concepts, peut-être encore un peu utilisés par certains managements passéistes, sont moqués par toutes les grandes entreprises.
Prenons le temps d'analyser les points un à un:
  • Un recrutement est toujours basé sur un besoin du recruteur. Ce point propose donc un retournement non pas du moyen d'instruction mais de sa raison même d'exister. On s'inscrit ici dans une vision féodale de la population.
  • Trouver des objectifs à l'instruction n'est pas un non sens. Pour autant il est impossible de trouver des critères quantitatifs à une tâche qualitative. On voit là une certaine idéologie commerciale, mais finalement ce n'est pas si grave, ce qui est gênant c'est son point de vue industriel tout à fait hors de propos. C'est un simple paradoxe logique. De plus ces critères de productivité seraient facilement falsifiables (à moins de mettre des moyens colossaux) et de simples audits, inefficaces, seraient d'un coût non négligeable.
  • Dans un cadre de productivisme, sous-financer des activités pour cause de rendement est une décision basée sur des principes commerciaux (se recentrer sur son coeur de métier et mieux identifier sa clientèle). Non seulement l'activité ainsi mise de côté a plutôt tendance à péricliter mais en plus l'entreprise dans son ensemble se trouve dans une situation de mise en concurrence interne qui à long terme entraîne un dysfonctionnement.
On démontre ainsi que le point de vue capitaliste n'est pas pertinent dans le domaine étudié. Mais on se rend compte en plus que dans le cadre même de cette approche Alexandre Obrodje ne maîtrise pas son sujet. Au final le sentiment qui prédomine est celui de la surprise de se trouver en présence d'une étonnante crasse d'incompétence (un peu d'humour toujours: notons que si le national prévaut en ce moment dans les discours d'Obrodje, finalement dans ce cas on n'en a plus rien à faire).

Au-delà du populisme manifeste qui consiste à faire croire à chacun que sa minorité sera imposée aux autres (et oui car ces fameuses valeurs morales à retrouver nous croyons qu'il s'agit des nôtres, les seules dont nous avons connaissance et dont nous comprenons les fondements), nous assistons à une entreprise de retournement des idées, un peu comme dans Le roi des Aulnes de Michel Tournier. Alexandre Obrodje use de cette même rhétorique déjà rencontrée dans l'Histoire de l'enfoncement du tabou et du parler-vrai sans jamais rentrer dans la construction de son raisonnement pour mieux surfer sur les imaginaires du peuple mécontent, en accusant toujours un autre jamais identifié.

Mais c'est ce rapport constant avec l'idée d'une Vérité unique et morale qui est toujours rappelée et qui laisse augurer de bien pire. Ainsi puisque la Constitution européenne est bonne le "non" citoyen est comparé au coup de boule de Zidane (faut-il vraiment être démagogique en plus d'anti-démocrate) et le peuple est disqualifie pour les échéances à venir, le vocabulaire s'apprend par coeur plutôt que basé sur une dynamique incontrôlée (lectures et contes, échanges sociaux, pratiques artistiques), dans le cadre ré-hiérarchisé employeur/employé le travail n'est valorisé que moralement. Ce point de vue déjà rencontré sur la culture (ici) pose problème dans l'architecture d'un pays qui s'oriente vers une abstraction et une complexification de son rapport au vivre-ensemble avec la mondialisation et la montée de puissances industrielles qui n'ont pas finies d'être nouvelles, mais s'inscrit avant tout dans une accentuation de la dé cohérence sociale (par la hiérarchisation, car gageons que tout le monde ne suivra pas le chemin de l'abandon de son parcours professionnel ou citoyen au gré de décideurs) qui prépare forcément au désordre (celui-là même qui nécessitera l'intervention de forces de police ou militaires).

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